24.10.2024
Par Cidàlia Païs et Christophe Pinheiro
Photo Credit: Marshall Wieczorek
THE BLACK DAHLIA MURDER est de retour avec ‘Servitude’, nouvel album sorti le 27 septembre dernier via Metal Blade Records. C’est le premier album sans leur chanteur emblématique, Trevor Strnad, parti bien trop tôt. Entre le passage au Hellfest et le Motocultor nous avons eu l’occasion d’échanger quelques mots avec Brian Eschbach, devenu chanteur et parolier du groupe. On peut vous dire que la rencontre avec ce talentueux musicien était magique ! L’équipe Vecteur présente au Bar Artistes au Motocultor était sous le charme de l’incroyable personne qu’est Brian. Sans oublier son sens de l’humour…
Brian, ce groupe est aussi ton bébé. Ça fait plus de 20 ans que vous jouez du mélo death metal, avec quelques changements de line-up, beaucoup de sang, de sueur et de larmes, des pertes, et des liens qui se renforcent. Si tu devais dire un mot ou quelques mots sur THE BLACK DAHLIA MURDER, que dirais-tu ?
Je dirais qu’on est là pour rester. THE BLACK DAHLIA MURDER, c’est notre bébé, à Trevor et moi. C’est un voyage de 21 années pendant lequel on a fait des choix et pris des décisions qui nous ont toujours fait avancer et nous ont toujours permis de créer pour notre public. Et nous avons eu la chance et la bénédiction de nous être trouvés et contactés.
Je reviens au chapitre 2020 : vous sortiez ‘Verminous’ et la pandémie est venue tout bouleverser, suivie de ce chapitre important que nous connaissons tous. Vous avez rendu hommage à Trevor avec un concert, avec la participation de Ryan, et son retour dans le groupe s’en est suivi…
Nous n’aurions pas fait ça sans lui. Je ne peux pas jouer de la guitare et dire que je ne suis pas si bien que ça. Mais quand nous avons eu cette idée, nous l’avons appelé et il n’a eu aucune hésitation. Il a dit : « Ouais, je reviens. » Nous ne voulions pas le faire sans lui.
Comment avez-vous travaillé sans Trevor ? Était-ce différent ? Avez-vous utilisé le même processus créatif ?
Je suis sûr que son processus créatif pour écrire des paroles était différent du mien. J’aime juste avoir un sujet qui me semble correspondre à la musique et faire des recherches dessus. Trouver les mots qui racontent une histoire, même si je n’ai pas beaucoup d’expérience en écriture, a été drôle. Il m’a fallu quelques semaines avant de me dépoussiérer. Mais après un certain temps, la mélodie des premières notes que l’on entend sur l’album a commencé à s’imposer. Une fois que j’ai eu ces accords et ces notes, ça a tout débloqué. C’était comme enlever le barrage de la rivière : l’embâcle avait disparu et la rivière pouvait couler. Je me suis dit : « Merci mon Dieu ! »
Des changements ont eu lieu : tu prends la direction vocale, Ryan revient avec la guitare rythmique, ce qui est génial. Ce choix s’est-il fait naturellement ?
En quelque sorte, ouais, je veux dire, la chose la plus contre-nature ou la plus étrange était d’être toujours dans un état de deuil sérieux, l’un des plus élevés. Mais sachant que le groupe devait continuer, nous n’avions que le temps dont nous disposions. Et parfois, les gens attendent des choses parce qu’ils ne pensent pas que ce soit le bon moment. Ou c’est peut-être étrange, mais certaines personnes pensaient que nous étions insensibles ou que nous ne respections pas les conditions en passant à autre chose aussi vite. Mais dans tous nos travaux, j’avais en tête que tout le monde dans ce groupe était là depuis sept ans. Et la chose la plus juste à faire en tant que membre de TBDM est de continuer à faire vivre le groupe.
Votre groupe est une source d’inspiration.
En 2023, on vous voit de retour au travail en préparation de votre 10e album, ‘Servitude’, qui sortira en septembre prochain. Quelle explosion ! Pourquoi avoir choisi le morceau post-apocalyptique “Aftermath” comme premier single, et quel est le sujet de cette chanson ?
Je pense que la musique a largement influencé notre choix. Ce que les gens entendent en premier, parce que c’est probablement la chanson la plus rapide de l’album. Et pour nous, c’est la chanson la plus familière ou traditionnelle de TBDM. Nous voulions juste sortir quelque chose avec un côté agressif. Bien sûr, les gens savent que nous pouvons toujours faire ce que nous faisons. Pour le contenu lyrique, l’histoire parle d’une météorite qui tue la plupart des humains sur Terre. C’est une chanson sur ce qui se passe dans chaque représentation post-apocalyptique que nous voyons : zombies, épidémies, extraterrestres. À un moment donné, les humains se regroupent et travaillent sur des ressources qui diminuent. Et je pense que, comme toujours, que ce soit des monstres, des zombies ou un tremblement de terre, les histoires parlent toujours de ce que les gens font dans ces situations. Donc, du point de vue des paroles, nous n’innovons pas vraiment ici. C’est une exploration de la réaction de l’humain après ces événements.
Cet album est du pur TBDM ! Ta voix s’accorde parfaitement avec tout ce rythme intense et agressif. Tu faisais déjà du backing vocals, et maintenant tu te retrouves parolier. Ce nouveau processus, comment le vis-tu ?
C’était assez naturel, et je pense que la pression de devoir travailler sur quelque chose de si différent de mon processus créatif habituel m’a poussé à me concentrer intensément, ce qui en a fait quelque chose de naturel à faire. Je suis excité. Je ne sais pas, c’était revigorant de faire quelque chose de nouveau et de découvrir en cours de route que j’aime ces choix. J’aime la façon dont ça se passe et je suis satisfait du produit fini, j’attends avec impatience d’écrire d’autres chansons.
Le single “Mammoth’s Hand” a été écrit par Ryan. Ce titre présente un tempo un peu plus lent, dans lequel tu déposes des paroles d’inspiration barbare. Et pour le troisième, “Panic Hysteric », il est question de rock’n’roll. Il y a plusieurs thématiques…
Pour ces chansons-là, un dimanche matin, je me suis réveillé et je me suis dit : « Très bien, je vais aller au bar et m’asseoir avec mon bloc-notes et mon journal pour lire des trucs. » Et je lisais à propos de gens qui flippaient à cause du rock’n’roll, craignant que ça ne conduise à la destruction totale de la moralité des gens dans les années 50. Et je lisais cette interview de Frank Sinatra qui, je suppose, détestait le rock’n’roll à cette époque et qui était vraiment très éloquent sur son dégoût pour ça. Il y a quelques citations de cette interview que j’ai intégrées aux paroles. Parfois j’ai du mal avec l’idée qu’ils jouent avec ça et paniquent à cause de ce qui en ressort. Pour “Mammoth’s Hand”, qui parle de Barbares chevauchant les mammouths, je pensais beaucoup à BeastMaster, je ne sais pas pourquoi, même s’il n’y a pas de mammouths, il y a, sur une des premières scènes, une horde barbare dévastant un village.
Une autre bonne source d’inspiration pour commencer la chanson a été The Omen. Il y a ces prêtres qui sont en quelque sorte espions, et qui essaient de tuer l’antéchrist. Je me suis dit : « Écrivons une histoire sur l’un des serviteurs de Satan interrogé par ces prêtres espions. » Et c’est ça, le titre “Servitude”.
Ce qui me frappe dans ce disque, c’est aussi les solos de guitare. Sur “Transcosmic Blueprint”, ce long solo de guitare, on ressent quelque chose de très fort…
Tout particulièrement avec la chanson “Transcosmic Blueprint”, c’était facile d’écrire une chanson sur “2001, L’Odyssée de l’espace”, parce que le travail musical tout au long de la chanson est très évolutif. Brandon explore beaucoup d’endroits dans toute cette session solo, et l’harmonie entre lui et Ryan est remarquable. Pour les gens qui apprécient la guitare, je pense qu’ils vont vraiment passer un bon moment avec cet album. Et c’est le premier album de TBDM où nous avons deux guitaristes principaux, dans deux esprits différents. C’est la clé de cet album. Je suis vraiment heureux et fier de ces gars.
C’est tellement beau de t’entendre..
Eh bien, tu peux être fier de cet album.
Je crois que tu as composé de la musique pour cet album. Il y aura maintenant trois guitaristes dans le groupe, même si tu ne joues pas sur scène. Vas-tu continuer à participer à la création musicale ?
Absolument. C’est quelque chose dont Ryan et moi avons parlé en groupe, mais je veux dire que tous les membres du groupe sont sur la même longueur d’onde. Je suis là depuis le début, et les riffs sont devenus la base de conception de nos chansons. J’ai eu la plupart du temps la main sur ces compositions, donc nous voulons toujours avoir cette perspective. Et c’est cool, c’est une des choses uniques à propos de cet album, d’avoir plusieurs auteurs compositeurs, alors que, vous savez, il n’y en a eu que deux auparavant sur n’importe quel autre album ; en ce qui concerne la musique, avoir des gars différents qui comprennent le concept et l’idée que propose TBDM, tout en ayant des trucs qui leur sont propres et qui rentrent dans les marges.
Je vous ai vu lors de votre dernier concert au Hellfest. J’étais tout devant la scène et j’ai vraiment apprécié le concert. C’était brutal. Et toi, qu’as-tu pensé de ce concert au Hellfest ?
Oh, le Hellfest est l’un de nos préférés. Pour moi, personnellement, c’est le cas. C’est l’un des meilleurs, simplement parce qu’ils proposent toujours une super collection de groupes et ça semble être plus éclectique. Tu sais, il y a plus de variété d’artistes au Hellfest que dans beaucoup d’autres festivals de cette taille. Non pas qu’il y ait des tonnes de festivals de cette envergure, mais ils se démarquent vraiment. Une fois, tu sais, je suis un énorme fan du groupe COALESCE, et ils sont revenus après des années de pause et nous étions au Hellfest et on jouait dans la même tente qu’eux et je flippais. J’avais la sensation d’avoir de nouveau 18 ans et je me disais “le groupe est en train de se détendre là-bas et je vais aller leur parler”. Je ne pense pas qu’il y ait un autre festival qui mettrait, je ne sais pas, un groupe comme COALESCE et TBDM sur la même scène, c’est vraiment génial !
Mais c’était bon de revenir et je dois dire que je ne suis pas un grand fan du registre de OFFSPRING mais leur prestation à été top !
Je vois que les enregistrements de l’album ont eu lieu au studio de Brandon, puis le mixage avec Mark Lewis, le mastering par Ted Janssen. Tout ça c’est la partie technique, mais, ensuite il y a cette incroyable pochette d’album, parlons de l’artwork. Comment est venue l’idée pour cette œuvre d’art ?
Je jure devant Dieu que je n’étais pas sous champignons ! ( rires )
Mais, tu sais, en pensant à cette œuvre d’art, je me suis dit, je voulais l’océan, et je voulais ce trou qui menait on ne sait où, mais, peu importe où on y allait. Mais, sur le chemin vers ce trou, -et ça c’était en fait l’idée de Paolo- on a ajouté les servants de Satan et les nuages. C’était vraiment cool de voir comment il a pu avancer sa peinture à différentes étapes, du début à la fin. Et le jour où il nous a montré l’image finale on était scotchés ! Paolo Girardi à fait un excellent travail. C’est un artiste incroyable. Et nous sommes ravis d’avoir pu travailler avec lui.
En Octobre et Novembre prochains vous serez en tournée aux États-Unis. Est-ce que des dates européennes suivront ?
Oh, ouais. On reviendra en Europe, on a la tournée américaine, mais ouais, on prévoit de revenir en Europe au printemps 2025, donc j’espère qu’on se verra à ce moment-là.
Une question que j’aime poser, dans quelles conditions recommandes-tu d’écouter ton album ?
La meilleure façon de l’écouter est de s’asseoir dans une bouée gonflable sur l’eau avec des écouteurs Bose. J’espère que Bose m’enverra des écouteurs gratuits maintenant ! (rires)
Le dernier mot est pour toi, Brian.
Mon dernier mot est d’aller chercher cet album le 27 septembre. Procurez-le-vous physiquement sous plusieurs formes. Il est prêt : disque laser, DVD, vinyle, peut-être un CD. Et oui, vous pouvez aussi le télécharger sur beaucoup de plateformes.
Photo Credit: Oli Sansom
Tel un phoenix qui renaît de ses cendres, THE BLACK DAHLIA MURDER revient, flamboyant et vêtu d’un nouveau plumage. Brian Eschbach délaisse la 6 cordes au profit du revenant Ryan Knight et prend le micro pour succéder au regretté Trevor Strnad. D’emblée, le bruit des vagues de “Evening Ephemeral” annonce un voyage dans un monde sans pitié, car lorsque le groupe commence à jouer, l’auditeur n’est en aucun cas épargné. Dans une succession de titres à la rythmique infernale, les riffs acérés s’accordent à la perfection avec des solos intenses d’émotions. Le morceau “Servitude” est typiquement le titre qui vous prend à la gorge et qui ne vous lâchera plus jusqu’à la dernière note de violence de “Utopia Black”, qui laissera clore cet album, comme il a commencé… par la douceur des vagues. Nul doute que ces cinq musiciens de talent et généreux ont eu raison de ce choix, continuer à faire vivre TBDM. Et que de là où il est, Trevor ne peut être plus fier de cet album magistral.