26.05.2023
Par Valentin Pochart, photo de Andrew Stuart
9 ans après la sortie de ‘Repentless’ et 5 ans après la tournée d’adieux de SLAYER, KERRY KING revient avec l’un des albums les plus attendus de cette décennie : ‘From Hell I Rise’ ! Nous avons pu le rencontrer afin qu’il nous parle de ce nouvel album, ainsi que de la suite de son projet solo qui part visiblement sur de très bons rails.
‘From Hell I Rise’ sort dans quelques semaines, comment
te sens-tu avant la sortie ?
Kerry : J’ai super hâte, je suis excité de pouvoir répéter avec les gars, et de pouvoir jouer des concerts avec eux. La plupart ont été mes amis depuis des décennies, et je ne sais pas si tu es au courant mais le clip est sorti aujourd’hui et tout le monde a l’air d’adorer. Donc ça va très bien et c’est excitant !
Tu ramènes la rage du thrash metal après 5 ans de covid, de propagande et de problèmes politiques aux Etats-Unis, et c’est bon de te voir revenir !
Merci ! Oui, le seul truc bizarre c’est que je n’ai jamais été chez moi pendant 4 ans et demi de ma vie, donc de se préparer à aller en tournée sera plus difficile pour moi cette fois, car je vais laisser à nouveau ma vie derrière. Mais tu vois, il est temps de sortir et de divertir les foules à nouveau !
J’ai trouvé que cet album a tout ce que j’aimais chez SLAYER, mais avec quelques surprises qui font vraiment un album unique. Quel a été le processus pour trouver un angle différent tout en gardant le son que tu as forgé ces 40 dernières années ?
Eh bien, j’y suis allé un peu comme d’habitude, mais je pense que j’avais un peu plus de liberté et j’ai pu amener des choses que je n’avais pas proposées chez SLAYER musicalement ou au niveau des paroles. Tu sais, je pense que ça représente toujours mon histoire, où j’ai été et mes influences. J’ai donc fait le tour de tout ça, du punk au hardcore en passant par le thrash ou l’influence de BLACK SABBATH ou JUDAS PRIEST. Je pense que tout est abordé dans cette collection de morceaux.
Je crois que j’avais vu passer tes premiers médiators indiquant « Reborn 2020 » en 2019. Est-ce le moment où tu avais commencé à bosser sur l’album ?
Non, à vrai dire il y a quelques chansons sur cet album qui sont des restes de ‘Repentless’ (l’album de SLAYER de 2015, ndlr), donc on pourrait dire que ça a commencé là, mais pour l’écriture de nouveaux morceaux, j’ai commencé après la fin de SLAYER. J’ai peut-être pris quelques mois de repos pour prendre du recul sur tout, et peu de temps après, la pandémie a frappé et je me suis dit que je n’allais pas traîner et perdre mon temps comme beaucoup de monde le faisait. J’allais rester actif et faire de mon mieux pour rentabiliser cet emprisonnement à la maison.
Tu as écrit toutes les paroles de l’album, est-ce que tu te sentais plus libre pour aborder certains sujets ?
Le seul truc qui me vient, c’est sur « Two Fists ». Je voulais vraiment que cette chanson semble faire partie d’un enregistrement de THE ADOLESCENTS ou D.I. par exemple, ou d’un groupe de punk du sud de la Californie. Et je voulais vraiment présenter cette chanson comme ça, donc dans les paroles j’ai pris la liberté de parler comme je le sentais, un peu à la manière d’un chanteur de punk, donc pas si fataliste comme les paroles typiques du metal, mais plus par exemple comme quand je dis « I need another drink ». Je n’aurais jamais dit ça dans une chanson de SLAYER, mais ça a complètement sa place dans un hymne punk !
Je pense que c’est un de mes morceaux préférés de l’album, notamment grâce au riff groovy que tu joues quand Mark crie « it’s fucking here to stay ».
Oui il a amené beaucoup de saveurs différentes sur cet album, dont des trucs que je ne savais même pas qu’il savait faire ! On a bossé avec lui pendant plusieurs mois au coup par coup, il venait et faisait des démos avec Paul et moi. Je lui ai dit que je n’avais rien contre DEATH ANGEL, mais qu’il fallait qu’il ne soit pas « dans » DEATH ANGEL, il fallait qu’il soit Mark Osegueda, et laisser les gens voir qui il est .
Tu viens de sortir un clip montrant tout le groupe en train de jouer « Residue », et ce line up a été un des sujets les plus discutés dans le monde du metal ces dernières années, et ça a l’air d’être vraiment le meilleur possible !
C’est vraiment le cas. J’en suis très content ! Pour moi, la chose la plus importante dans cette période de ma vie, et de ma carrière, c’était de jouer avec des amis qui ont le même intérêt que moi pour faire de la musique à partager avec le monde. Je ne voulais pas de drames à ce stade de ma carrière, je n’ai pas le temps pour ça dans ma vie. J’adore ces gars, je ne pourrais pas être plus heureux de les avoir choisis, et ils ont vraiment tout donné pour l’enregistrement.
As-tu ressenti de la pression avec toute l’attention qui a accompagné cet album solo ?
Pas vraiment. Tu sais, je m’y suis habitué parce que par exemple, sur le dernier album de SLAYER, le seul sans Jeff Hannemann, on était très attendus et on s’est vraiment dépassés. Pour celui-ci, tu sais, c’est le premier sans quiconque avec qui je suis habitué à travailler. Je savais donc que les gens auraient leurs réserves et se poseraient des questions. Mais très vite, j’était tellement content de ce que je faisais dans les démos sur lesquelles je travaillais avec Paul que j’avais très hâte de le finir et de commencer à jouer avec les nouveaux gars, ainsi que de montrer au monde ce qu’est ce groupe.
A propos des démos, tu travaillais avec Paul puis vous échangiez les fichiers avec Mark, c’est bien ça ?
Eh bien Mark venait jouer directement avec nous, mais oui, on lui envoyait des démos. Je lui envoyais aussi les paroles avant-même qu’il ne soit pris. On faisait ça parce qu’on est amis, et même chose pour Phil (Demmel, ndlr) et Kyle (Sanders, ndlr). Je leur envoyais des démos avec la base de ce que je voulais, pour qu’ils puissent voir ce qu’ils voulaient faire. Et Mark venait toutes les 5, 6 ou 8 semaines pour améliorer les démos existantes. Il venait améliorer ça et avait mieux appris les chansons, donc ils avaient vraiment bien tout appris avant qu’on aille à Hollywood pour l’enregistrement lui-même.
Nous venons de parler un peu de « Residue », qui vient de sortir, et je n’ai vu aucun commentaire négatif sous la vidéo. Tout le monde est rentré dans le groove et a admiré l’alchimie entre vous. Est-ce que c’était quelque chose sur lequel vous vous êtes concentrés ?
Je savais qu’il y aurait une alchimie car nous sommes tous amis. Ce que tout le monde n’avait pas en tête, c’est que chaque membre de mon groupe était au chômage à part Mark. Kyle n’avait pas de groupe, Phil n’avait pas de groupe, et évidemment Paul et moi n’avions pas de groupe. Donc c’est l’assemblage de 4 musiciens sans travail et du chanteur de DEATH ANGEL.
J’ai aussi beaucoup aimé que tu donnes ton opinion sur certains sujets sur l’album, à une époque où les gens disent aux artistes de la fermer. Je crois que certains morceaux parlent notamment de l’annulation de la loi « Roe V Wade » sur l’avortement il y a 2 ans !
Oui, c’est arrivé à peu près au moment où Paul et moi avons eu le Covid, ce qui nous a fait dérailler quelques temps. Mais j’avais deux chansons à finir au niveau des paroles, « Residue » et « Toxic ». Donc on a partagé plein d’idées bien entendu, mais celle-ci a pris le dessus, ça m’a fait penser aux trois juges de la Cour Suprême qui ont été choisis par Trump. Chacun d’entre eux a menti pour avoir ce poste, et ces personnes sont chargées de décider des choses pour chaque aspect de nos vies. Comment cela pourrait-il être acceptable ? Les gens ne se posent pas cette question et ne voient pas que les juges de la Cour Suprême ont dû mentir pour arriver là. Et cela ne me va pas du tout.
« Toxic » est aussi une des mes préférées de l’album, et on voit l’énergie que vous y avez mis !
Oui, « Toxic » sonne vraiment comme si elle sortait d’un album de SLAYER. Il y a des éléments de SLAYER dans ce morceau, c’est certain.
Avec toute cette énergie, on ressent vraiment la colère tout au long du disque, et on n’a pas l’impression qu’il dure 40 minutes, mais beaucoup moins. Je crois que je l’ai écouté 8 fois en 2 jours !
Oui il est plutôt cool à écouter ! Tu sais, il y a des moments où Paul et moi répétions et faisions déjà des démos pour un deuxième album, donc j’ai eu le temps de penser à autre chose sans écouter « From Hell I Rise ». Puis au moment où je devais apprendre les morceaux pour les vidéos, j’ai recommencé à l’écouter à la salle de sport, et je l’ai aimé autant que quand on l’avait terminé ! Je pense donc que c’est le genre d’album qui rentrera très vite dans la tête, et qu’on écoutera beaucoup. Quand je grandissais en tant que fan de metal, je prenais des albums de JUDAS PRIEST et je les connaissais par cœur au bout de deux jours à force de les écouter, et j’espère que ce sera la manière dont les gens vont aborder cet album. Et on dirait que les gens sont très excités à propos de celui-ci, donc j’espère que ça va devenir un classique !
Quelle chanson de l’album correspond le mieux à ton humeur aujourd’hui ?
Probablement « Tension », parce qu’il pleut des cordes ici et c’est horrible (rire) !
Comment as-tu commencé celle-ci ? Car elle ajoute une ambiance particulière à l’album !
J’ai travaillé sur celle-ci à Las Vegas. Je me souviens être dans le pavillon près de la piscine, et je travaillais sur cette chanson. La musique est venue assez vite, et il n’y a pas grand-chose qui s’y passe, il n’y a pas autant de riffs que sur « Crucifixion » par exemple. Mais « Tension » a une atmosphère et je voulais garder celle-ci pendant toute la chanson, et qu’elle finisse en allant vers « Everything I Hate About You ». J’ai pensé à la rendre plus longue, et à y ajouter des choses, mais je me suis dit qu’il valait mieux la garder courte en l’associant à un autre morceau. Un peu comme on avait fait à l’époque avec « Altar Of Sacrifice » et « Jesus Saves ». Je voulais reproduire ça, et la musique a cette atmosphère qui te fout des frissons, donc je voulais des paroles un peu dans le style un peu flippant d’un tueur en série. Chaque strophe dit quelque chose du genre « la misère fait tout » ou « la victoire fait tout », tout s’additionne avec tout jusqu’à ce qu’on arrive à « les ennemis sont nécessaires ». Tu sais, j’aime bien jouer avec les voix et créer un genre de scénario, et si je l’ai bien fait, quand tu écoutes ça, tu peux le voir dans ton esprit. C’est ce que j’essaie en tout cas, et j’espère avoir réussi.
J’ai remarqué que l’album commence par « From hell I will rise » dans les paroles, et finit par la chanson « From Hell I Rise ». Est-ce que tu avais cette structure en tête longtemps avant d’écrite l’album ?
Eh bien je suis juste tombé dessus, c’était totalement un accident. J’inventais des paroles pour « Where I Reign » et « from hell I will rise » m’est sorti de la bouche. Je me suis dit « je ne peux pas utiliser ça parce que j’ai déjà écrit une chanson qui s’appelle « From Hell I Rise » ». Puis je me suis dit, avant même qu’il ne soit décidé que ce serait la première chanson, que ce serait pas mal que ça ouvre l’album pour prophétiser un peu la dernière chanson. Je n’avais jamais fait ça auparavant, donc j’étais assez fier de moi quand j’y ai pensé. Mais c’était un accident. Un accident heureux vu comment c’est sorti, mais un accident.
Tu as évoqué le nouvel album sur lequel tu travailles. Comment vois-tu le futur du projet ?
Eh bien il nous reste une poignée de chansons des sessions de ‘Repentless’ sur lesquelles Paul et moi avons travaillé, ainsi qu’une poignée de ‘From Hell I Rise’ que nous avons faites en démo et il y en a au moins trois d’écrites depuis, donc il y a pas mal de choses. J’ai hâte d’aller sur la route et de passer mon temps libre à bosser sur des paroles, car ce que Paul et moi voulons faire quand on tourne pour un album, c’est retourner enregistrer immédiatement pour garder ce côté précis et aiguisé qu’on a en tournée. Ce serait dommage de laisser passer ça et de devoir se remettre dans le bain. Donc quand on finira la tournée de l’album numéro 1, on essaiera de rentrer enregistrer l’album numéro 2 immédiatement, et le garder de côté jusqu’à ce que le label veuille le sortie. Peut-être que ça viendra vite, peut-être que ce sera 6 mois après… Mais vous n’aurez pas à attendre longtemps, ça c’est sûr !
Vu que Mark est dans DEATH ANGEL, est-ce que tu as en tête l’agenda pour l’enregistrer ?
Non, je ne sais pas quel sera le timing.
On te verra cet été en Europe, notamment au Hellfest et au Graspop. Que peut-on attendre de ces concerts qui arrivent à grands pas ?
Nous avons une longue histoire avec le Hellfest, et je suis heureux qu’ils nous aient programmés pour ce festival sans même connaître qui serait dans mon groupe, ni même comment on sonnerait. Donc je suis vraiment heureux que les Français aient tant voulu nous y vois. Je ne sais pas combien de temps je jouerai pour chaque, probablement entre 45 minutes et une heure. Donc je jouerai 90% de mon album, car j’ai l’impression que si je le joue en entier je n’aurais pas de raison de revenir, puis avec le reste du temps je ferai des chansons de SLAYER que j’ai écrites ou co-écrites. Donc vous n’entendrez pas « Angel Of Death » sur cette tournée ni même cette année, même si j’y arriverai sûrement un jour. Mais je préfère vraiment compter sur des trucs dont j’ai fait partie.
As-tu quelques mots pour ton public français pour conclure l’interview ?
J’ai très hâte de revenir voir mes fans français ! On passe des moments tellement cool à chaque fois qu’on est là, et le Hellfest est toujours super accueillant ! Donc tout le monde a très hâte de revenir au Hellfest !
Chronique par Valentin Pochart
Le très attendu premier album solo de KERRY KING est enfin là ! Le vétéran du Big 4 nous offre aujourd’hui près de 45 minutes de thrash metal pur et dur, revenant aux sources de la rage propre au style avec un line up de folie : Mark Osegueda (DEATH ANGEL) au chant, Paul Bostaph (ex-SLAYER) à la batterie, Phil Demmel (ex-MACHINE HEAD) à la guitare lead et Kyle Sanders (ex-HELLYEAH) à la basse ! On enchaîne donc les riffs assassins qui nous rappellent les 40 premières années de la carrière du KING bien entendu avec un chant ultra incisif qui surprendra certainement les fans de DEATH ANGEL, Mark Osegueda nous proposant un registre beaucoup plus agressif que d’habitude. Mais le guitariste nous propose également quelques changements d’ambiance comme sur le plus punk « Two Fists » ou l’inquiétant « Tension », qui font que l’écoute de l’album passe très vite sans jamais être redondante. Une fois arrivé au morceau final « From Hell I Rise », il est clair que KERRY KING ramène le son de SLAYER des flammes de l’enfer, et rien ne saurait nous faire plus plaisir pour cet album solo qui tient toutes ses promesses. « FUCKIN’ KERRY KING » !!!!!!