Chronique par Christophe Descouzères
Depuis 2007, les canadiens de Counterparts développent un mélange de punk, de metalcore et de melodic hardcore sur des textes sombres et introspectifs du chanteur Brendan Murphy. Sa voix chargée d’émotion brute émerge de mélodies déchirantes à l’énergie primale. Le groupe explore, album après album, les tréfonds de l’âme humaine et ses tourments les plus profonds. La poésie noire de Murphy déploie sa force dans un scream féroce et habité, sublimant l’abyssale détresse de ses thématiques. Sa sensibilité à fleur de peau déborde d’une discographie qui a marqué le hardcore de son empreinte. Counterparts a largement contribué à renouveler le genre et en est un acteur incontournable, sans contestation.
Si le line-up a constamment évolué au fil des années, jusqu’à ne garder que son fondateur et chanteur, la recette, elle, n’a pas changé : des riffs violents articulés par des passages mélodiques et des breaks lourds, un son rugueux, authentique et expressif. La musique de Counterparts est un cri, une libération émotionnelle salvatrice et nécessaire.
Mais ce nouvel EP, sorti par surprise, rompt de manière assez radicale avec les tonalités des précédents albums. Exit l’approche mélodique, les compositions ici sont beaucoup plus frontales et poignantes. La descente dans la psyché, dans le deuil, dans la douleur est totale, conférant à cet opus quasi-nihiliste une noirceur désespérée et une agressivité sans retenue.
Ouvrant avec A Martyr Left Alive, dont la violence va donner d’emblée le ton de cet EP, le groupe évoque sans détour la souffrance des luttes internes, le désespoir, le « martyr vivant ». Murphy y hurle son mal-être sur des guitares furieuses, martelant elles aussi la désolation d’exister. Plus qu’un anecdotique EP de transition entre deux albums, Heaven, Let them die est avant tout un coup de poing dans le ventre, un hurlement déchirant, jusqu’au dernier titre éponyme, qui supplie de mettre fin à tous ces calvaires. Il n’y a aucune échappatoire dans ces six morceaux, comme autant de prières sans réponse, de plaintes vouées au vide, portées par la voix d’un Brendan Murphy mis à nu et propulsées jusqu’à nos âmes par Tyler Williams à la basse, Jesse Doreen à la guitare et Kyle Brownlee à la batterie.
Counterparts continue son exploration cathartique des abîmes de l’humanité, des blessures à vif, du renoncement et l’impuissance face à une existence sans pitié et sans issue.